dimanche 20 mars 2011

Franck Gérard – En l’Etat (1999 - ?)

En l’Etat est un travail évolutif, inachevable par définition, qui a débuté le 13 juillet 1999, à la suite d’un accident. « La mort m’a sauvé. (...) Jusqu’à 27 ans, j’étais immortel. (...) A partir d’aujourd’hui, chaque jour je prendrai des photos ».

Franck Gérard est selon ses propres mots, un voleur d’images. Ce corpus de photographies prises sur le vif, à la fois autonome et séquentiel, ne pouvant supporter l’idée de série d’images, constitue observation aussi bien méthodique qu’hasardeuse du réel. Il déambule dans l’espace public, capte des situations qui le touchent, sans apriori ni préalable, le moindre geste incongru, la moindre situation banale extraordinaire ou absurde, le moindre incident, sont répertoriés comme autant d’états constituant ce corpus de notre quotidien, une « encyclopédie modeste et poétique de mes errances dans les espaces publics et privés » écrit-il.




Cet accident écrit-il « devait orienter ma pratique de la photographie dans le sens de l’abondance conçue comme l’affirmation d’une présence au monde fondée dans la perception, investie aussi bien par le langage que par la mémoire et le devenir des formes » De cette accumulation de signes, il en résulte un « un immense bordel ».

Ce work in progress tente de reconstituer un état, une manière de voir. Sans intervenir. « Je cherche à répertorier les gestes presque chorégraphiques du quotidien et le mouvement incessant du monde comme une collection, un vocabulaire universel et modeste ». « En l’état est lié à la notion de réceptivité dans laquelle on se retrouve face au monde ». Franck Gérard se trouve lui même dans un état toujours nouveau lorsqu’il photographie, lorsqu’il construit ces formes. Car l’habitude du lieu amène à l’aveuglement, c'est-à-dire le fait de ne pas voir ce que l’on a devant soi, y compris l’évidence.

La création est, pour le photographe, liée au lieu, au contexte. « Comment l’homme agit et contraint son environnement jusqu’à le modifier durablement ? » En effet, l’homme bouleverse son environnement de manière infinie : travaux, construction, destruction, plantation, etc. L’intervention humaine sur le paysage qu’il envahi d’images. Franck Gérard travaille activement sur un autre quotidien, différent des représentations contemporaines. « On subit les images », « Quand on voit ce monde, je ne vois pas comment on ne peut pas l’être » (engagé) dit-il.

L’univers des scènes d’En l’Etat met en scène l’humain pris au piège par ses propres interventions : des produits en séries que l’homme s’impose, qui ne correspondent pas à son échelle, un aménagement du territoire où l’homme se perd dans les normes qu’il a lui-même créé pour se conditionner. Ces situations burlesques ne sont pas sans rappeler la toile de fond des films de Jacques Tati comme Play Time.

De son discours, il en ressort une grande modestie. Il parle de ses photos comme de « trucs », « Les déchets sont très importants ». Pourtant c’est à 18 ans que Franck Gérard commence sa formation artistique, presque 10 ans avant le début de En L’Etat. Il rentre alors à l’école des Beaux-arts de Nantes où il choisit la photographie comme support d’expression majeur. Diplômé, il est invité à faire sa première exposition au Confort Moderne à Poitiers. Il est invité par Raymond Depardon à exposer aux Rencontres internationales de la photographie d’Arles durant l’été 2006 « Un œil, plein d’humour, de malice et d’espièglerie, un vrai regard... Quel plaisir ! ».



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